Le Chemin de Croix

jeudi 12 juin 2014
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Articles parus dans les numéros 56, 57 et 58 de la Barrette

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Vue des travées est de la nef avec les six premières stations.

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Vue des travées ouest de la nef avec les six dernières stations.


Un des éléments les plus emblématiques de l’église Marie-Immaculée est le chemin de croix qui domine toutes les travées de la nef. En voici une description.

Le chemin de croix est ici tout à fait particulier dans le sens où il est contemporain de l’église et a été réalisé « sur mesure », alors que dans bon nombre d’édifices, les chemins de croix sont des éléments rapportés, bien souvent postérieurs à la construction des édifices et ce d’autant qu’il s’agit d’une dévotion récente, seulement autorisée par le pape Clément XII en 1731 comme pouvant être étendue au-delà des seules églises franciscaines.

A Marie-Immaculée, il s’agit de magnifiques peintures réalisées directement sur un enduit plâtre.

Les affres du temps ont été plutôt clémentes : les couleurs sont encore en bon état, seules les peintures situées du côté Ouest, le côté le plus exposé aux intempéries, ont été abîmées. Du côté Est, la majorité des peintures est dans un excellent état de conservation.

 Première station : la condamnation de Jésus à mort.

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La scène présente Ponce Pilate, assis au prétoire, mis en évidence par rapport aux autres personnages, en hauteur sur trois degrés. Il se lave les mains dans un baquet d’eau présenté par un jeune serviteur, conformément à ce qui est indiqué dans les Évangiles.

Le Christ, sur la droite, a le regard baissé, résigné, les yeux fermés. Une auréole, rehaussée à la feuille d’or, vient le distinguer particulièrement des autres personnages de la scène.

Jésus est tenu à l’avant-bras gauche par un personnage situé à côté de Lui qui indique avec son pouce gauche une direction. On pourrait supposer qu’il fait là du stop, mais la probabilité de cette signification est toutefois relativement faible si l’on considère le taux d’équipement automobile dans les ménages français à la fin du XIXème siècle…

Plus prosaïquement, ce geste indique que le Christ, venant d’être condamné, doit être emmené au lieu du supplice.

Sur la droite de Jésus, on peut distinguer deux personnages représentatifs : un en habit juif, l’autre habillé en soldat romain.

Le décor situé à l’arrière nous montre des bâtiments typiques du Proche-Orient sous un beau ciel bleu (laissant toutefois apparaître une légère perturbation au fond de la scène).

Devant ce décor, des colonnes imposantes viennent figurer le palais de Ponce Pilate, qui est mis en valeur par une tenture rouge située derrière lui.

 Deuxième station : Jésus chargé de sa croix.

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Le personnage central est ici le Christ, levant les yeux au ciel, le visage toujours entouré d’une auréole rehaussée à la feuille d’or. La scène se déroule à l’extérieur, toujours sous le ciel bleu avec cette fois-ci plus de nuages à l’horizon.

Nous sommes en dehors de la ville, que l’on aperçoit en arrière plan avec ses bâtiments et ses remparts, toujours selon une architecture que l’on peut retrouver au Proche-Orient.

Jésus est chargé de sa croix par deux personnages. Il s’agit sans doute des charpentiers ayant réalisé la croix, le personnage de droite possédant des outils dans une sacoche pendant de son épaule.

Une foule entoure Jésus avec également des soldats romains. Un officier romain se trouve à l’arrière de la scène, sur un cheval.

 Troisième station : la première chute.

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Le décor au fond possède une décoration identique à celle de la scène précédente, mais les nuages sont plus sombres, et sur la droite semblent se transformer en tempête.

Jésus est allongé, la main droite posée par terre. Il est en train de se relever, au centre de la scène. Il a le regard tourné vers la personne qui L’aide à se relever, son visage est tourné vers nous, mais Il regarde celui qui L’aide.

La croix est présentée derrière Lui. Sur la gauche, un soldat romain brandit des verges pour frapper le condamné et le forcer à se relever.

Un homme soutient la Croix tombée et un autre se penche pour aider à la redresser.

 Quatrième station : la rencontre avec la Vierge Marie.

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Dans le décor, on voit la progression du cheminement car la ville est maintenant située sur la droite de l’image, plus loin qu’elle ne l’a été dans la réalité.

Sur la gauche, au fond, on trouve maintenant un décor montagneux. L’artiste montre ainsi clairement que les événements du chemin de croix ont une évolution spatiale, qu’ils ne sont pas situés à un unique endroit.

La masse nuageuse, toujours sombre, a singulièrement grossi ; on ne distingue presque plus de ciel bleu.

Jésus se tient debout, portant la croix, quasiment au centre de la scène. On retrouve toujours l’auréole en feuilles d’or autour de sa tête. Jésus a le regard tourné vers la droite, vers Marie. Marie regarde Jésus, la tête baissée et le regard meurtri.

Une auréole rehausse également le visage de Marie, mais elle est plus petite que celle de Jésus et a été seulement peinte en jaune sans être rehaussée de feuille d’or. Marie est accompagnée de St Jean, situé derrière elle et regardant vers le ciel, et de Marie-Madeleine qui est à genoux et se presse aux pieds du Christ qui l’accueille la main ouverte.

Sur la gauche de Jésus, un personnage tourné vers Lui semble le presser à continuer sans s’arrêter.

 Cinquième station : Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix.

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Le Christ, vu de profil, est tourné vers la gauche, au centre de la scène, le visage légèrement baissé et résigné, toujours rehaussé d’une auréole à la feuille d’or.

Il est entouré par deux personnages principaux : à sa gauche, un personnage qui semble assez vindicatif, les yeux grands ouverts, attrapant Jésus avec ses mains comme pour le forcer à avancer.

A sa droite, Simon de Cyrène se précipite pour soulager Jésus du poids de la croix. Simon de Cyrène est habillé comme un ouvrier, avec un chapeau simple (un pétase de type grec) sur la tête, les outils à la ceinture, ce qui démontre qu’il arrive sur le chemin du Calvaire de manière totalement imprévue.

La croix est mise en évidence, au centre, juste derrière le visage de Jésus, et inclinée à 45° : la partie visible est donc uniquement un “X” (ou croix de saint André) où le visage de Jésus est situé juste en dessous du centre.

En arrière-plan, nous pouvons apercevoir plusieurs visages donc un soldat romain, avec casque et lance, sur la droite. On distingue aussi d’autres lances et casques en arrière-plan.

 Sixième station : Sainte Véronique

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Ici, le ciel bleu a presque entièrement disparu : seule demeure une frange à l’horizon, seuls les nuages gris et sombres forment le décor.

La composition est quasiment identique pour la partie centrale à la station précédente : Jésus, au centre, vu de profil, tourné vers la gauche. Le visage est ici incliné vers le bas, en direction de Véronique, agenouillée sur la gauche de la peinture. On retrouve au second plan la croix inclinée dont on voit juste le “X”.

Véronique est située sur la gauche, en tunique jaune, avec les cheveux couverts d’un voile blanc maintenu par une mentonnière. Elle est agenouillée et regarde vers le haut, vers Jésus, en montrant le voile avec lequel elle vient d’essuyer le visage du Christ. L’on peut d’ailleurs apercevoir le visage de Jésus imprimé sur le voile, en tons de gris.

A gauche de Jésus, un personnage brandit une verge de la main droite pour frapper Notre-Seigneur. Un autre personnage, situé à gauche, regarde avec mépris vers le bas en direction de sainte Véronique.

A droite de Jésus, un homme portant un casque met la main gauche sur l’épaule de Jésus pour le forcer à avancer En arrière-plan, nous retrouvons toujours la foule ainsi que des soldats romains accompagnant la montée au calvaire. Un homme couvert d’une coiffe blanche est sans doute un prêtre ou un officiel du Temple.

 Septième station : Jésus tombe pour la deuxième fois.

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La septième et la huitième station sont situées de part et d’autre du tambour d’entrée de l’église, sous la tribune, ce sont les deux stations les moins visibles du chemin de croix. Elles sont moins larges que les autres fresques, utilisant néanmoins tout l’espace disponible entre les piliers. La septième station est à droite du tambour quand on regarde vers le fond de l’église.

Jésus occupe la majeure partie de la scène : au centre, à genoux après sa chute, la face tournée vers nous, les yeux semblant regarder le ciel.

La croix, très imposante, vient renforcer le dramatique de la scène. Tout s’efface, tout est tourné vers la Passion de Jésus.

Les personnages, à l’arrière, relégués au second plan, sont complètement effacés. Juste derrière le Christ, sur la gauche, on peut voir deux personnages aidant Jésus à relever la croix. On aperçoit sur la droite et l’arrière de la scène plusieurs hommes casqués, dont celui de droite tient une lance sans doute pour faire levier pour aider à redresser la croix.

 Huitième station : Jésus console les filles d’Israël.

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Cette station est située à gauche du tambour quand on regarde vers le fond de l’église.

L’on retrouve encore ici la composition identique à la cinquième station, avec Jésus vu de profil, tourné vers la gauche.

Le visage est cette fois-ci droit et regarde une des filles d’Israël (voilée) tandis que de sa main gauche il bénit une fille agenouillée, en prière (les cheveux étendus sur les épaules). La femme voilée représente probablement les « justes », la femme aux cheveux libres les « pécheurs ».

La croix, toujours très présente et maintenant marquant du centre de son “X” le visage de Jésus. Sur la gauche, un soldat romain, casqué et en armure, brandit une lance de la main droite et regarde le Christ de manière antipathique, pour que Jésus continue de marcher.

 Neuvième station : Jésus tombe pour la troisième fois.

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Cette station, première du côté ouest de la nef présente à nouveau une composition horizontale, à l’opposée de la composition verticale des deux précédentes stations, coincées entre les piliers de l’entrée.

On aperçoit de nouveau le ciel, ici réellement tempétueux, avec des couleurs d’orage.

Jésus est ici allongé de tout son long, après sa troisième chute, par terre. Il occupe quasiment toute la partie basse de la peinture. Il a le visage tourné vers un personnage situé sur sa gauche, qui l’attrape par le col de sa tunique pour le relever. A droite, un autre personnage situé au premier plan vient relever Jésus comme un objet à l’aide d’une corde passée autour de sa taille.

La croix, située juste derrière Jésus, est également présentée de manière horizontale, seule une des branches du patibulum offrant un peu de verticalité.

Un personnage situé juste derrière Jésus soutient la croix. Un soldat romain, situé en arrière, vient frapper le Christ sur la nuque avec le manche de sa lance tenu dans sa main gauche.

On aperçoit très bien deux officiels juifs, avec leur coiffe caractéristique. Celui de droite tient un document dans la main.

 Dixième station : Jésus est dépouillé de ses vêtements.

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C’est la seule station qui ne possède pas de petite croix en bois indiquant le numéro : que le lecteur se rassure, cette croix n’a pas été perdue mais se trouve au presbytère où elle a subi une réparation suite à une chute !

Contrairement aux stations précédentes, la Croix est ici reléguée en partie basse de la fresque, posée à plat sur le sol avec un homme, sur la droite, qui prépare les clous, un marteau en main.

Jésus est debout, nous faisant face, légèrement décalé sur la gauche par rapport au centre de l’image. Le regard est vide, résigné, regardant l’humanité.

Un homme, se tenant juste à sa gauche, s’apprête à le dépouiller de sa tunique écarlate. À gauche, un soldat tient déjà le manteau bleu qui a été retiré à Jésus.

Devant lui, un autre soldat accroupi a un dé dans la main droite et est prêt à tirer au sort le vêtement de Jésus, selon l’Écriture [1]. Sur l’arrière, on peut voit de chaque côté du Christ un soldat romain avec casque et lance.

Enfin, le ciel, au fond de la scène, a des nuances jaunes-orange qui indiquent les ténèbres qui vont s’étendre sur la ville.

 Onzième station : Jésus est cloué sur la Croix.

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Il s’agit indubitablement de la station la plus abîmée par les infiltrations de la façade ouest.

Mais, malgré le fait que près d’un quart de la surface de peinture ait disparu, il se trouve heureusement que l’essentiel de la scène présentée demeure visible.

Il s’agit en effet du crucifiement, réalisé sur le sol, à l’horizontale.

Le Christ est allongé sur la croix, le regard vers le Ciel. Le bras gauche, déjà cloué sur la croix, sort du cadre normal de la fresque, marqué par un liseré doré et il nous présente la main transpercée d’où le Précieux Sang coule déjà sur la terre.

Sur l’arrière, un personnage tient le bras droit de Jésus tandis qu’on ne peut qu’apercevoir une partie du bras de l’homme qui tient le marteau, prêt à enfoncer le clou dans la main droite de Jésus. Sur la droite, un homme à cheval accompagné d’un enfant semble demander à une autre personne des renseignements sur la scène en cours. Les autres personnages sont trop abîmés pour être reconnaissables.

 Douzième station : Jésus meurt sur la Croix.

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Les ténèbres ont envahi la terre, beaucoup plus sombres que sur les fresques précédentes, les nuances orangées ont totalement disparu. Tout est accompli.

Cette scène est impressionnante et le peintre a su dépeindre tout le drame qui se déroule. L’axe est résolument vertical : la croix est plantée en terre, au centre, le monde possède un nouvel axe.

Le Christ a les yeux fermés, Il a déjà reçu la blessure au côté de la lance d’un soldat romain. Les bras étendus de Jésus viennent embrasser l’humanité tout entière : l’œuvre du Salut, véritable porte entre Dieu et les hommes, est ainsi offerte à tous.

La scène, contrairement aux précédentes, est très dépouillée et ne montre que l’essentiel, plus de soldats romains, plus de personnages haineux : tous les personnages secondaires ont disparus, on les imagine avec nous contemplant la crucifixion et se moquant, comme le dit l’Évangile.

La Sainte Vierge, Marie-Madeleine et Saint Jean sont seuls présents au pied de la croix. Contrairement aux autres stations, Ste Marie-Madeleine et St jean ont une auréole.

On aperçoit au loin (plus loin que dans la réalité) la ville de Jérusalem dans ses remparts, l’obscurité des ténèbres à amener des habitants à allumer des lumières.

 Treizième station : Jésus est descendu de la Croix.

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Les ténèbres ont disparu : le ciel est bleu et serein, seuls quelques nuages sombres à droite indiquent encore que les éléments furent déchaînés. Il a fallu le temps que Joseph d’Arimathie aille demander le corps du crucifié à Pilate [2] et que celui-ci s’assure de la mort du Christ.

Debout au pied de la Croix, Joseph d’Arimathie et Nicodème se sont approchés, Nicodème, s’appuyant sur une échelle qui a servi à descendre le Corps, tient en main la tenaille qu’il a utilisée pour enlever les saints Clous. Les deux membres du Sanhédrin semblent converser, comme considérant les Écritures comme réellement accomplies.

Jésus est descendu de la croix, Il a été remis à Marie qui Le tient sur un de ces genoux. Saint Jean, à gauche, aide Marie à soutenir le corps sans vie de Notre-Seigneur. A droite, les saintes femmes (les Évangiles indiquent qu’il y avait « plusieurs femmes » [3] on reconnaît Marie-Madeleine à sa longue chevelure non voilée) pleurent la mort du Sauveur.

 Quatorzième station : la mise au tombeau.

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Le corps de Jésus est déposé sur un linceul et porté dans le sépulcre par Joseph d’Arimathie (qui en perd son manteau) et Nicodème.

Bien que l’Écriture dise que le tombeau était taillé dans le roc [4], l’artiste a représenté une entrée faite de pierres de taille.

Les bras de Jésus sont croisés sur la poitrine, laissant apparaître uniquement la plaie de la main droite. Saint Jean et Marie contemplent la scène depuis l’arrière, Jean soutenant Marie qui a un bras passé autour de celui de l’apôtre. St Jean retrouve ici son auréole.

En haut à gauche, nous retrouvons Marie-Madeleine et une autre femme en pleurs, se lamentant sous l’entrée du sépulcre. En partie basse, une femme, assise, tient sans sa main droite (d’un geste plutôt nonchalant, mais que l’on pourrait considérer contemplatif) la couronne d’épines.

Au pied du tombeau intérieur en pierre taillée, on aperçoit un gros pot qui doit contenir les cent livres d’un mélange de myrrhe et d’aloès qu’a apporté Nicodème [5].


[1Cf. Matth. 27, 35 et les passages parallèles, rappelant le psaume 21

[2Matth. 27, 58.

[3Matth. 27, 55.

[4Matth. 27, 59 ; Marc. 15, 46 ; Luc. 23, 53.

[5Jn. 19, 39. Comment différencier Nicodème et Joseph d’Arimathie dans les scènes de ce chemin de Croix ? Il est dit dans l’Évangile de St Jean que Nicodème est « un des premiers des Juifs » (Jn. 3, 1), Notre-Seigneur lui dit : « Tu es maître en Israël » (v. 10) ; Joseph quant à lui est membre du Sanhédrin, un membre « honoré » (Marc. 15, 43). Il nous a semblé plus juste d’identifier Nicodème comme le plus âgé des deux en raison du texte de St Jean.



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samedi 18 mars 2023

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